Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels tient sa 40eme session à l’Office des Nations Unies à Genève du 28 avril au 16 mai 2008. A cette occasion, le Comité aura à examiner le troisième rapport périodique de la France. Dans ce rapport, la France expose les mesures mises en œuvre pour garantir sur son territoire les droits économiques, sociaux et culturels. Les membres du Comité des droits économiques, sociaux et culturels reçoivent également des rapports alternatifs présentés par des ONG. Ainsi, pour la France plusieurs ONG ont soumis des rapports par lesquels elles tentent de montrer les manquement de l’Etat à ses devoirs en matière de garantie des droits des citoyens. Parmi ces ONG, notons la présence de Tamazgha qui a présenté un rapport sur les droits linguistiques et culturels des Berbères en France. Un représentant de Tamazgha s’est rendu à Genève où il s’est exprimé devant les membres du Comité lors de la séance réservée aux interventions des ONG, le 28 avril, pour présenter les grandes lignes du rapport de l’organisation.
Dans son intervention devant les experts onusiens, le représentant de Tamazgha a tenu à rappeler l’ancienneté de l’immigration berbère en France et l’importance de l’implantation d’une population qui compte quelques deux millions d’individus.
Le représentant de Tamazgha déplore la discrimination dont font objet les berbérophones de France et par là leur langue et leur culture. Selon le représentant de Tamazgha, les quelques mesures mise en œuvre par l’Etat français en direction des populations immigrées venant d’Afrique du Nord concernent les seuls langue et culture arabes. Les Berbères sont ainsi délibérement "catégorisés" comme étant Arabes. Comme s’il y avait là une volonté de prolonger la politique d’arabisation des Etats en place en Afrique du Nord !
Concernant les citoyens français dont l’une des langues est le berbère (tamazight), le représentant de Tamazgha a soutenu devant les experts onusiens que, à ce jour, rien n’est prévu dans le dispositif institutionnel de l’Etat français pour protéger et promouvoir les langue et culture berbères. Pourtant des recommandations officielles allant dans le sens de la nécessité de l’enseignement de la langue berbère et la promotion de la culture berbère ont été faites au gouvernement. Il a cité à titre d’exemple deux rapports importants à savoir celui de Guy Carcassonne remis au gouvernement en 1998 ainsi que celui de Bernard Stasi remis au Président de la République en 2003. Les deux rapports ont plaidé pour la nécessité, voir l’urgence, d’assurer l’enseignement de la langue berbère dans les établissements scolaires français.
Tamazgha, par la voix de son représentant, est revenue sur la Convention-cadre signée par le Ministère de l’Education Nationale et l’Inalco [1] en février 2006 dans le but de la mise en place d’une préparation à l’épreuve facultative de berbère au baccalauréat dans les établissements du second degré. Cette Convention-cadre est restée lettre morte parce que le Ministère concerné n’a honoré quasiment aucun de ses engagements.
Enfin le représentant de Tamazgha a attiré l’attention des membres du Comité qui examineront le rapport de la France sur le fait que ce rapport ainsi que les réponses données par l’Etat partie aux questions des membres du Comité ignorent tout simplement la langue berbère et les langues minoritaires en France de manière générale. L’Etat français confirme – dit le représentant de Tamazgha – le fait qu’il n’ait rien mis en œuvre pour la prise en charge et la promotion de la langue et de la culture berbères puisqu’il ne fournit aucune information à ce sujet. Et il termine par demander aux membres du Comité d’appeler l’Etat français à mettre en œuvre des mesures concrètes en faveur de la langue et de la culture berbères en France.
Par ailleurs plusieurs organisations étaient présentes à Genève pour présenter des rapports alternatifs à celui de l’Etat français. Un groupe de 20 ONG et syndicats ont présenté un rapport unique, le Bureau européen des langues les moins répandues, Ni Putes ni Soumises, Bretagne Réunie ainsi que l’Observatoire des droits linguistiques au Pays Basque ont aussi présenté des rapports et pris la parole lors de la séance dédiée aux ONG.
Les séances questions-réponses entre les experts du Comité et la délégation gouvernementale française sont prévues les 29 et 30 avril. Le débat s’annonce très passionnant.
Il faut rappeler que le Comité des droits économiques, sociaux et culturels, est un mécanisme des droits de l’Homme des nations Unies. Il est créé conformément à la résolution 1985/17 du Conseil économique et social des Nations Unies.
Organisation Tamazgha .