
Notre premier ministre est très occupé pour avoir une pensée – une simple déclaration – pour nos concitoyens et frères amazighes de la montagne qui subissent depuis quelques jours – et cela continuera jusqu’au samedi prochain – les affres d’une météo horrible, faite de blizzard, de chutes inédites de neige et de pluie torrentielle. Des dizaines de villages se retrouvent isolés, coupés du monde. Des milliers d’âmes sont en proie à un froid mortel et leurs maisons risquent de crouler sous le poids de la neige qui dépasse, par endroit, les deux mètres et demi. A ceci s’ajoute le ravage que subiront les cultures vivrières et le bétail, source de survie de ces populations oubliés par nos responsables départementaux qui se complaisent dans des réunions et des discussions mondaines, dans des salons climatisés.
Notre premier ministre est occupé par ses chamaillades partisanes de sa politique de la petite semaine et ses projections électorales de 2021, épaulé par un autre fkkih – Benkirane – qui a saigné à blanc le pouvoir d’achat des citoyens.
Notre premier ministre est occupé, il veut d’abord rassurer les Rbatis que l’eau qu’ils consomment est potable, du moment que lui-même, la main sur le cœur, a juré en boire sans modération, appelant à témoins d’autres commis de l’Etat, pour conforter ses propos.
Notre premier ministre n’est pas occupé : il s’en contrebalance. Il s’en fou des cris de détresse de dizaines de citoyens, des sonnettes d’alarme de la société civile, images et vidéos à l’appui qui montrent des établissements de santé délabré, devenus des cimetières désolés pour ceux que le destin a poussé à s’y rendre. Des établissements scolaires qui tiennent de baraques où sont parqués « les fils du peuple » qui ingurgitent des programmes scolaires de rabais qui les déracinent, les privent de leur mémoire et les livres à l’inconnu. Des bourgades enclavées où des milliers d’âmes vivotent comme des parias sur leur propre terre.
Notre premier ministre laisse les autorités locales gérer nos montagnes amazighes comme des ranchs où règnent la répression, le mépris, la marginalisation et l’oppression délibérée. Et pour cause, ni lui ni ses ministres ne connaissent ni Imilchil, ni Ikniwen, ni Taghighact, ni Tawjjaâut, ni Aghbala, ni Zawit Ahansal, ni Ayt Bouwulli, ni Msemrir…Non, il ne les connait pas. Il a grandi dans une Zaouia où les tartuffes lui ont inculqué un savoir caduc qui fait de tout ce qui n’est pas conforme à la chariâa : HARAM.
Notre premier ministre ignore aussi que ce sont ces populations de montagne qui ont subi de plein fouet les drames de la colonisation ; ce sont les descendants de Moha Ouhammou Azayyi, De Ahmed Lhansali, Moha Ou Said de Leksiba, Assou Ou baslam, Zayd Ouhmad…et Addi Ou Bihi et qui ont été renvoyés aux vestiaires après « l’indépendance » octroyée par le colonisateur à ses relais et à ses disciples.


Notre premier ministre se targue d’appartenir à une mouvance passéiste qui a les yeux fixés sur le rétroviseur, qui, au nom de Dieu, le Clément le Miséricordieux, et veut œuvrer pour l’instauration de la justice et du développement, en fermant les yeux sur le calvaire quotidien des amazighes de montagne et leur quadrillage – sécuritaire – par une administration aux relents colonialistes.
A Anfgou, à Tilggouit, à Ayt Imlil, à Ouzighimt et ailleurs, des citoyens crèvent de froid. Et notre premier ministre n’a daigné donner de conférence de presse pour informer ses concitoyens de la situation et des mesures que son gouvernement, qui s’attelle à l’édification d’une société égalitaire et d’un Etat de droit, va prendre. Il n’a rien fait non plus pour mobiliser la presse et les médias pour aller s’enquêter du sort des montagnards.


Non il préfère respecter scrupuleusement les rendez-vous de ses prières quotidiennes, prier pour l’avènement du Khalifa, inviter des terroristes du Hamas sur sa table, se taire sur les massacres que son mentor turque perpétue contre les civils kurdes…
La montagne amazighe vit un drame, une tragédie dont les conséquences vont grandissant. La politique menée par le gouvernement risque de provoquer une fracture incurable. Les montagnards gémissent, lacérés dans leur chair, écrasés dans leur dignité. Mais tels des sphinx, ils renaitront de leurs cendres, grandiront pour un jour demander des comptes aux maitres du moment.