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Réflexions sur le mouvement culturel amazigh


Par Amnay Massin, AmazighWorld.org
Date : 2008-10-03

Amnay Massin

Les Amazighs sont appelés à la réorganisation de leurs mouvements.  L’IRCAM qui devait s’occuper d’institutionnaliser la langue et la culture amazighes s’est averée n’être qu’une institution parmi les autres : elle est là pour servir une politique culturelle globale imposée depuis l’avènement du royaume des Idrissides. L’amazighe sans une volonté politique sérieuse (ce qui est le cas pour l’instant) ne pourra pas s’épanouir ni même s’ouvrir sur un marché marocain de propriétés symboliques. Elle est même condamnée à une marginalisation institutionnelle déclarée qui a pour but d’affaiblir l’effet de ces défenseurs sur la société marocaine.

Pourquoi est-il temps de repenser l’organisation du mouvement ?

L’état des lieux :

Avant la création de l’IRCAM, le mouvement amazigh marocain était partagé entre les pro-makhzen et les anti-makhzen, ou les activistes de dedans et les activistes de dehors, même si le va-et-vient était toujours permis, et  que le statut ambigu de certaines associations était visible et ostentatoire. D’un côté, se trouvaient ceux  qui étaient acteurs au sein du jeu politicien marocain dans la mise en scène de sa politique globale et qui partagent encore le gâteau dans toutes les stratégies d’occupation de l’espace politique ; de l’autre,  les associations coordonnées au sein du CNC et dont l’objectif clair était de mettre en place des signatures de lettres ou des communiqués collectifs.

Constatant que le mouvement s’élargissait et que le questionnement identitaire s’imposait de façon pressante, notamment après l’échec des émissaires du makhzen à restreindre le débat de l’amazighité à un territoire rural, l’Etat  marocain fut obligé de redessiner une autre carte du paysage politquo-culturel amazigh. Ainsi la création de l’IRCAM,  une des revendications majeures du mouvement,  fut une des issues à la crise.

L’IRCAM est-t-elle une institution comme les autres?

1er angle: L’IRCAM est une institution étatique comme toutes les autres, cette opinion pourra être celles des jeunes chercheurs recrutés, des salariés qui touchent leurs salaires, et qui considèrent que leur métier au sein de l’IRCAM est comme celui de n’importe quel chercheur au sein de n’importe quelle université du royaume. Ils ne sont là ni pour satisfaire les Amazighs, ni le mouvement, leurs comptes ne doiventt être rendus qu’à leur employeur.

Cette vision n’est-elle pas aussi celle du stratège qui est derrière la création de l’IRCAM ? Pourquoi ne pas absorber les diplômés «Amazighistes» qui peuvent nuire à la politique culturelle adoptée par l’Etat ?

2ème angle: L’IRCAM est plus qu’une institution, c’est un guetto pour mieux marginaliser la culture amazighe et une machine pour absorber les amazighistes « anciens » activistes de dehors. Une institution a-t-elle besoin de tout ce mélange de genres dans son conseil ? Des arabistes engagés, des présidents éternels d’associations parce qu’ils sont leurs Rways, une parité de sexe à tout prix, des tarwaysins.... ?

Pourquoi donc un guetto pour les Amazighs et leur culture?

Les instances internes de l’IRCAM dès le début ont voté à l’unanimité pour le choix du caractère latin, mais l’intervention du makhzen pour le caractère tifinagh a empêché l’amazighe d’accéder à la lumière, à la mondialisation. En effet le caractère latin  est plus adéquat scientifiquement, d’ailleurs le recteur actuel  en était l’un des défenseurs  les plus fervents. Et pour ne pas ignorer et dévaloriser le travail de quelques chercheurs qui ont fait et qui font encore leur métier de salarié, il est utile de préciser que l’IRCAM a accumulé de nombreuses productions dans différents domaines, mais dans un caractère imposé de l’extérieur. Et enfin de compte les Ircamistes étaient appelés même à défendre les tifinaghs qu’ils n’ont pas choisis, à l’imposer aux chercheurs. Une institution scientifique et objective qui se respecte doit-elle accepter un choix dicté de l’extérieur?  En ce qui concerne la standardisation, peut-elle abandonner les langues amazighes vivantes au dépend de la création d’une langue artificielle sans aucun rapport anthropologique réel avec les langues des Amazighs. Ne va-t-elle pas connaître le même sort que l’arabe classique ? Nos enfants ne finiront-ils pas par l’abandonner à la sortie des classes, parce qu’artificielle et marginalisante ?

Et même les livres accumulés dans un caractère symboliquement «guettoïsant», ne sortent pas du guetto réel (le bâtiment de l’IRCAM) En effet,  il n’y a pas de diffusion généralisée sur le territoire marocain, l’enseignement ne couvre pas l’ensemble du  territoire national et la télévision amazighe n’émet toujours pas. Certains prénoms amazighs sont toujours interdits. Le Maroc est toujours constitutionnellement arabe, le Maghreb aussi. Le parti de l’Istiqlal (des uns) va appliquer sa revendication majeure : l’arabisation totale de la vie des Marocains. L’Ircam signe des accords de partenariat avec des nommés du conseil des immigrés alors qu’ils ne sont pas représentatifs. Les employés de l’Ircam doivent-ils accepter tout cela sous prétexte que les salaires sont plus élevés qu’ailleurs ?            

Les activistes du  dehors sont-ils au rendez-vous avec l’histoire ?

A mon sens, tout acquis pour l’amazighité devrait être sauvegardé : l’institut de la recherche amazighe est une revendication amazighe, et toute critique devrait être porté sur ses orientations et non sur sa raison d’être. Ses salariés devraient-t-ils tout accepter sous prétexte que les salaires sont plus élevés? Se considèrent-t-ils  encore acteurs du mouvement ? Malgré ces interrogations, il me semble aussi que se focaliser trop sur l’IRCAM et ses employés est une manœuvre dangereuse puisque le stratège ou l’employeur est bien arrivé  à transformer le débat vertical en un débat horizontal, car nous croyons que n’est ennemi de l’amazighe que celui qui se dit son ennemi et qui s’affiche comme tel.

Le « dehors » de l’IRCAM est frappé lui aussi par une balkanisation des tendances. La mode est de se radicaliser au maximum au point même de copier les erreurs des Kabyles, et de reproduire des slogans vides de sens comme « ulac smah ulac... »,  ou bien d’accepter la sponsorisation des officiels pour organiser des fêtes, des festivals, et apprécier la douceur de Tagwella pour mieux intégrer le dedans.

Aussi est-il d’actualité de parler de la politisation brute de l’amazighité sans clarté sur la ligne idéologique dans la création de tout parti ou organisation politique. La seule tentativejusqu’à nos jours est celle du PDAM que le Makhzen a fait avorter avant même qu’il voit le jour. Créer un parti politique au Maroc ne serait-ce pas s’aligner aux côtés de ceux qui adhèrent à une mise en scène dirigée par le Makhzen ? Y a –t-il un contexte favorable à la création d’un parti politique ? Pour la majorité des Marocains un parti politique est une assemblée d’opportunistes, de profiteurs et de malhonnêtes. Serons nous capable de changer cette vision dominante chez les Marocains en créant un parti qui adhère au jeu et aux enjeux électoraux ?
 
Se déplacer aux urnes au Maroc ne relève pas de la pratique d’un devoir citoyen, mais malheureusement d’un échange de « bons procédés »  pour un service légal ou illégal,  matériel ou symbolique rendu par un des prétendants au poste de parlementaire ou du président d’un conseil.

Mais un parti peut être aussi un groupe homogène de pression à condition de ne pas copier les partis politiques marocains existants. Un parti est d’abord une ligne idéologique claire au moins pour ces dirigeants, qui a une capacité d’union, et surtout un budget important pour faciliter les déplacements, pour mieux communiquer et diffuser ses idées. Il est obsolète de nos jours de pratiquer le jeu politique avec les méthodes misérables des années 70. Un parti, que les camarades le veuillent ou non , est une entreprise qui peut déposer son bilan à tout moment si la trésorerie n’est pas à la hauteur de l’idéologie qu’on veut communiquer.

 Reprenons le départ

Il me semble, sans aucune vision nostalgique, que le mouvement amazigh était  très fort à la période du conseil national de coordination, quand il  publiait son périodique Amzday, parce que c’était un vrai groupe de pression qui regroupait plusieurs tendances et acteurs.

Il est raisonnable aujourd’hui d’accepter que le mouvement soit divisé par ceux qui s’ouvrent sur le makhzen  au point d’accepter tout au dépend même de leurs convictions affichées avant. Et ceux qui se referment sur eux mêmes et qui présentent une telle paranoïa qu’ils veulent tout politiser et rejetent toute production culturelle faite dans leurs langues, sous prétexte qu’un produit culturel est là pour contrecarrer leurs actions politiques.

Il est temps  que les Amazighs, ceux qui y croient encore, marquent et affichent en plein jour leur opposition à cette aparteid, à cet ethnocide, à cette marginalisation.... Il est temps pour chaque groupe qui se veut homogène de se fédérer au sein d’une petite coordination que ce soit sur la base régionale ou idéologique,  afin d’arriver en fin de compte à s’organiser au sein d’une coordination nationale alternative gérée par des fédérateurs élus capables de rassembler des différents acteurs dont les idées sont hétérogènes.

Toute historisation du mouvement  est marqué par la création de l’institut, revendiquée auparavant par les Amazighs. Pour cela il est impossible de ne pas parler d’un MCA sans parler de l’avant et l’après l’IRCAM. Ce dernier a divisé les acteurs en acteurs de dedans et ceux de dehors. Il est impératif aujourd’hui qu’une autre coordination alternative, une organisation avant-gardiste voit le jour pour que les hommes libres ne ratent pas cette fois-ci leurs cibles et leurs rendez-vous avec l’histoire.        



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