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Pr. Abderrezak Dourari, Directeur du centre national pour l’enseignement de tamazight : «Le problème du berbère est dépassionné»


Par depeche de kabylie, AmazighWorld.org
Date : 2006-10-18

Pr. Abderrezak DOURARI  est professeur de l’enseignement supérieur en sciences du langage à l’Université d’Alger. Il est Docteur d’Etat en linguistique et directeur du centre national pédagogique et linguistique pour l’enseignement de tamazight. Dans cette interview, il parle de l’enseignement de la langue amazighe. Il en fait un bilan et évoque les perspectives.

Est ce que vous pouvez nous faire le point sur le centre que vous dirigez mais dont le lancement des activités semble un peu tarder. A quoi est dû ce retard?

Abderrezak DOURARI

ll Le Centre national pédagogique et linguistique pour l’enseignement de Tamazight (CNPLET) a été crée par décret exécutif 03-470 du 02 Décembre 2003. J’ai été désigné à la tête de ce centre fin décembre 2004. Mon point de vue est connu sur cette question. Il consiste en un travail en collaboration ouverte, réfléchie et rationnelle entre spécialistes algériens et, même, étrangers, intéressés par cette question afin de tirer tamazight hors de la sphère du conflit politique et idéologique permanent. Elle doit être ce qu’elle aurait dû toujours être : une question consensuelle entre Algériens et Maghrébins non complexés par leurs origines et leur histoire millénaire mais qui ne s’enferment pas, dans celle-ci, non plus, car l’ouverture sur l’autre y compris l’autre soi, est une exigence de modernité et du monde dans lequel nous vivons, un monde mondialisé qui tend à la communication intensive à l’échelle de la planète et donc à l’uniformisation linguistique et culturelle.
J’ai en toute logique donc, immédiatement (fin janvier 05) organisé des journées d’étude regroupant des spécialistes et autres intéressés par la question de tamazight pour étudier le décret de création sus-indiqué. Il s’est avéré que le décret attribuait au centre des missions scientifiques de haut niveau académique et, par-dessus tout, diversifiées sans lui donner les moyens de se doter en encadrement scientifique de haut niveau.
Des journées d’étude, est sortie une proposition de modification du décret de création du centre. Celle-ci a été soumise à la tutelle qui l’a soumise à son tour à la Direction de la fonction publique et un comité ad hoc a été réuni vers septembre passé pour étudier la proposition. Celui-ci a donné son accord, puis le MEN a saisi les services du chef du Gouvernement pour donner son accord sur ces changements. On attend aujourd’hui la réponse.
Les raisons du retard, si retard il y a, sont d’ordre bureaucratique et procédural.
Nous avons quand même activé durant cette période. Nous avons mis en place des équipes de recherche au niveau des directions de recherche (cinq directions dont l’aménagement linguistique, la pédagogie et la didactique, langue, littérature, civilisation et patrimoine, les langues maternelles et celle de la communication et de l’édition). Ces équipes directionnelles ne sont pas installées officiellement car l’organigramme découlant du modificatif du décret de création n’est pas encore approuvé. Mais nous avons préparé les hommes et les textes juridiques. Il se peut qu’il y ait quelques changements à ce niveau car certaines personnes pourraient ne plus être disponibles du fait du retard accusé dans leur désignation. Le MESRS n’a toujours pas répondu à notre demande de mise à disposition de ces chercheurs (appuyée par le MEN par courrier émanant de M. le Ministre) qui devaient selon notre demande garder des occupations d’enseignement et d’encadrement universitaires à côté de leurs nouvelles tâches. Nous avons aussi pris contact avec des personnes activant dans le domaine amazigh au niveau national et international pour une entraide dans des domaines particuliers de l’aménagement et de la pédagogie en milieu plurilingue. Nous avons pris contact avec des personnes susceptibles d’encadrer des antennes régionales de recherche…
Nous avons regroupé ces personnes à deux reprises pour des journées d’études sur la question de l’enseignement et de l’aménagement de tamazight avec d’autres chercheurs intéressés par le domaine de plusieurs régions d’Algérie.
Nous avons organisé des journées d’étude à Zéralda et nous sommes très contents de la qualité de la participation et des interventions.

Vous avez organisé deux journées d'étude sur l'enseignement de tamazight. Il s'est confirmé qu'il s'agit d'un immense chantier. Comment comptez-vous vous y prendre, puisque votre centre est le premier concerné par cet enseignement ?
ll C’est en effet, contrairement aux apparences, un immense chantier. Et il est d’une telle complexité qu’il ferait fuir les hommes doués d’une très grande force de caractère. Mais si les moyens humains et matériels sont mis entre les mains de spécialistes tenaces et raisonnables, ils auront raison de lui sur le long terme par des actions séquentialisées, coordonnées et échelonnées sur l’axe du temps. Il faudra intervenir progressivement et en concertation la plus large sur l’enseignement, les méthodes, les objectifs, le corpus…et l’opération pédagogique globale car l’apprenant n’a pas tamazight comme seule matière. Il ne faut pas se contenter de poser les matières à enseigner et à apprendre en contiguïté, les unes à côté des autres, mais les penser de manière globale de sorte qu’elles fassent unité, tenant compte du volume horaire.
Ici plus qu’ailleurs, la précipitation est à éviter car elle peut être fatale si l’on tablait sur la facilité et si l’on suivait nos passions et nos instincts.
 

Le problème majeur est le manque de moyens tant humains ( les enseignants) que matériels (les livres). Comment parer à ces insuffisances?
ll Les moyens humains manquent, car nos cadres sont contraints à s’expatrier pour mieux gagner leur vie. Certains nous disent qu’ils aimeraient vivre dans un pays fait et non pas dans un pays éternellement à faire. Cela pourrait se comprendre car de toute façon on ne vit qu’une seule fois. Nous avons choisi de vivre ici et nous ferons avec ce qu’il y a. Cela prendra plus de temps, mais on y arrivera. On formera des cadres et on y a déjà pensé, car nos directeurs de recherches pressentis sont tous de rangs magistraux et très expérimentés. Ils encadreront la recherche des chefs de départements de recherche qui sont du grade de magister, donc plus jeunes. Ils profiteront de leur expérience et prendront le relais dès qu’ils seront prêts. Les livres il faudra les écrire et c’est pour cela entre autres que nous avons pensé à une direction de l’édition.

 

L'existence de plusieurs variantes peut aussi poser  problème en sachant que le kabyle a pris une avance considérable sur les autres variétés. Quelle est votre conception de la chose?
ll Le problème le plus important au plan objectif, en plus des problèmes subjectifs, est effectivement celui de la diversité des variétés linguistiques de tamazight. Il existe une variation inter dialectale et intra-dialectale importante. Le problème est, aujourd’hui, comme vous l’avez constaté lors de ces journées d’étude, dépassionné. En Mars 1990 j’avais commis un article sur les problèmes liés à l’enseignement de tamazight et j’avais osé parler de cette variation et c’est un déluge de feu que j’ai eu à essuyer. La langue arabe scolaire a toujours été, elle est diversifiée et l’on parle de fasahât ; les langues latines sont diversifiées et ainsi en est-il de toutes les langues du monde, y compris les langues anglaise et espagnole qui occupent aujourd’hui le haut du pavé international. La diversité n’est pas seulement une richesse comme le dit le proverbe, elle est simplement naturelle.
L’idéologie de l’unique et de l’unicité crée le besoin de l’unique. Mais la nature autant que la culture d’ailleurs, s’organisent selon d’autres logiques. Aucune contrainte fut-elle militaire ne peut imposer une seule norme linguistique sur un territoire aussi grand que l’Afrique du Nord ou de l’Algérie. L’Afrique du Nord qui était berbérophone est aujourd’hui arabophone dans sa majorité. Ce n’est pas grâce à la politique linguistique d’arabisation qui a été un échec patent, mais en raison de forces de la dynamique économique, sociétale et historique. Cette dynamique qui n’était dirigée par personne mais régie par un très fort besoin de communication intense entre Maghrébins berbérophones parlant divers dialectes, a été entamée dès le 13ème siècle de l’ère chrétienne. Ce besoin de communication a naturellement érigé l’arabe des Banu Hilâl, des Ma’qil et des Soleim, adapté à l’espace et à la culture locaux, comme langue véhiculaire. Aujourd’hui on sait que l’essentiel de la population est arabophone et les variétés berbères ont survécu sans qu’elles aient à mener un quelconque combat.

 

La variation dans le domaine tamazightophone continuera sans doute à être la règle. Et cela sert à quoi de vouloir éliminer cette diversité ?
ll Le plurilinguisme sera encore pour longtemps le trait définitoire de la population maghrébine. C’est la société langagière qui en décidera.
L’école, pour des raisons de coût en communication surtout, a besoin d’une norme à enseigner.


Elle se constituera sans doute, je ne préjuge de rien. Elle continuera, je pense, à enseigner chaque norme dans sa sphère d’utilisation. La variation intra-dialectale pourra être réduite avec le temps et l’effort et seulement pour la variété qui sera utilisée et consacrée par l’usage dans le domaine élaboré, formel. Pour le reste on verra si les conditions économiques, commerciales et culturelles changent pour que tamazight devienne une langue nécessaire d’échange intensif dans le Maghreb…
Le chantier est donc très grand et les moyens dont on disposera quoi qu’on fasse, seront inférieurs au besoin. La force de fusion culturelle et linguistique à l’échelle nationale, maghrébine et mondiale est telle que les efforts seront titanesques. Le français peine à se maintenir devant l’anglais qui lui, est menacé dans sa position par le dynamisme de la langue espagnole. Que dire de la langue arabe scolaire ou de nos langues autochtones ? Rien n’est définitivement gagné ou perdu.

 

Mais le kabyle a pris une grande avance sur les autres parlers berbères…
ll Le kabyle a effectivement pris une certaine avance sur les autres variétés de tamazight. Avance relative. La langue parlée par une majorité (question de démocratie linguistique) pourra inconsciemment être influente par certains de ses standards. Nous ne voyons aucun problème à ce que des échanges d’influences se fassent entre les variétés de la même langue ou entre les langues différentes car elles se feront même si nous ne le voulons pas. La loi de Jacques Toubon 1995 qui voulait imposer la purification linguistique du français de termes provenant de l’anglais, n’a abouti qu’à un flop médiatique. La loi sur la généralisation de l’arabisation de 1996, même assortie de peines, a elle aussi fait long feu. L’échec est à méditer. Les mécanismes de la société ne sont pas si malléables pour qu’on puisse les changer à notre guise et selon notre caprice idéologique du moment.
 

Entreprendre un travail de standardisation ne va-t-il pas aboutir à la création d'une langue artificielle à l'image de l'arabe classique. Ne risque-t-on pas d'arriver à un tamazight classique qui ne sera la langue maternelle de personne ?
ll Nous avons en partie répondu à cette question. Nous répétons que la standardisation ne peut se faire selon nos caprices. La création d’une langue artificielle par un effort d’hypernormativisation dans un climat d’hypertrophie identitaire est un danger évident et on le connaît maintenant avec l’expérience d’enseignement de tamazight depuis voilà une décennie. Elle a abouti à un rejet par les apprenants. La pratique médiatique en a pâti elle aussi et la radio Chaîne II en est très consciente car elle est face à l’immédiateté de la nécessité d’une langue de communication intensive en tamazight. On ne comprendra ce besoin véritablement que lorsque l’on a eu à discuter avec son directeur dont la détresse face au problème n’a pas de pareil. La langue arabe scolaire, autrement plus confortable, connaît ce problème. Les académies de langue arabe créent du lexique qui n’est pas employé par les usagers de cette langue. On a beau essayer de faire passer le terme «naqqâl» ou «djawwâl» ou même de «manqûl» ou «mahmûl» pour dire le téléphone portable, les usagers disent «mobayl» au Moyen Orient ou «portable» au Maghreb. Ainsi en va-t-il de «hasûb» ou «rattâb» pour ordinateur ou computer, les Maghrébins disent toujours «ordinateur» et les Moyen Orientaux disent toujours «computer». Le Français Toubon avait essayé d’effacer de la mémoire des Français le terme anglais «week-end» en proposant «fin de semaine» qui en est la parfaite traduction, mais allez comprendre, le francophone préfère week-end. D’autres termes ont réussi comme «ordinateur» au lieu de «computer». Après tout il ne s’agit pas de l’orgueil national !!mais de communication fonctionnelle. Certains gestes pourraient être économisés comme l’hypertrophie néologique de la langue, tendance- raciste par moment- qui consiste à expurger une langue des termes empruntés à une autre même et peut-être surtout quand celle-ci est de la même famille linguistique (jalousie des cousins). Nous avons vu le cas du français et de l’anglais. Il faut se convaincre que comme il n’existe pas de race pure, il n’existe pas de langue pure. Le français emprunte à l’arabe littéraire classique et à l’iranien comme celui-ci a emprunté et emprunte au français et même à l’iranien. Le terme arabe «firdaws» est emprunté à l’iranien parlé par Zarathoustra, de la même façon que le français «paradis» est un emprunt au même Zarathoustra. «Sirât», terme coranique connu est un emprunt au latin qui signifie toujours en italien «la rue», «la voie». Le tamazight emprunte normalement à l’arabe maghrébin, au punique et au français. Et la langue n’est pas du tout obligée de restituer ce qu’elle emprunte à son propriétaire originel!
La précipitation idéologique en matière de politique d’arabisation comme en matière de tamazight a poussé les protagonistes à la création d’une langue artificielle rébarbative. Cela constitue leur échec et non pas celui de la langue.

 

Pour certains, le problème de la transcription est tranché de fait par le terrain qui a opté pour le latin; pour une minorité, notamment celle qui politise la question, il faudrait opter pour les caractères arabes. Si celà venait à se produire, ne pensez-vous pas que ceci donnera lieu à un rejet massif de tous les utilisateurs notamment ceux de la Kabylie. Aussi, que deviendront les milliers d'ouvrages qui existent en caractères latins?
ll La question de l’écriture pose des problèmes symboliques importants mais aucun problème linguistique. Une langue peut s’écrire dans n’importe quelle graphie et même avec un alphabet constitué de deux caractères, comme c’est le cas pour le langage binaire des ordinateurs (des séries de un et de zéro pour toutes les langues). Une certaine graphie peut être plus adaptée au système phonologique d’une langue. Les langues chamito-sémitiques ont des caractéristiques communes que n’ont pas les langues indo-européennes notamment les phonèmes situés dans la sphère pharyngale et laryngale. Mais n’oublions pas que l’alphabet latin est une adaptation du phénicien aux langues indo-européennes. Le mot alphabet lui-même est phénicien (aleph signifie bœuf, beyt signifie maison, le yod signifie main, le gamma signifie chameau …). Réadapter les caractères latins pour convenir aux caractéristiques phonologiques du tamazight n’est pas moins idéologique que de vouloir généraliser les caractères arabes à cette même langue. Mais qui a empêché les uns et les autres d’écrire dans la graphie de leur choix ? Le problème est donc d’écrire quel que soit la graphie. Le choix du caractère ne se pose pas pour nous en tant qu’institution de la même façon qu’il se posera pour la recherche scientifique, car celle-ci de toutes façons n’utilise pas la graphie courante mais seulement les caractères de l’alphabet phonétique international. Pour nous il s’agit de choisir le caractère en fonction de la demande sociale et compte tenu des contraintes de l’institution éducative. D’autres paramètres doivent entrer en ligne de compte.
Tamazight est aujourd’hui officiellement langue nationale. Qu’est-ce que cela implique sur le plan de l’image de marque que constitue le caractère graphique ? Veut-on donner un sens extensif (tout le territoire national) au terme «national» ou non ? Si oui, que faire pour que les autres régions non-tamazightophones fassent bonne réception de ce nouvel ancien né dans la société ? Il est vrai que la Kabylie a eu à souffrir d’une politique linguistique d’arabisation aux relents racistes et revanchards. Quand on a été frappé même avec une banane on la rejette car c’est l’instrument avec lequel on nous a fait souffrir. C’est de la réactance. Mais c’est à nous de faire aimer cette langue au-delà de sa sphère d’influence naturelle. N’est-il pas meilleur pour une langue de minimiser ses détracteurs et les raisons de son rejet ? C’est du marketing d’image, car la langue ne change pas lorsque l’on aura changé son emballage qu’est l’écriture. Cela est un débat qu’il faut mener froidement et sans passion, mais ici plus qu’ailleurs les passions sont vives et il faudra absolument en tenir compte.

 

La mondialisation, l'Internet et les télévisions  étrangères constituent une menace sérieuse sur tamazight à l'instar des autres langues. N'est- ce- pas ?
ll Pourquoi tout aborder sous l’angle de la menace ? La mondialisation n’est une menace que pour les conservateurs animés par des valeurs muséographiques. L’évolution et le changement sont dans la nature des sociétés humaines et aujourd’hui, nul ne peut prétendre ressembler à ses ancêtres. Les Européens semblent être issus selon certains généticiens de femmes nord africaines ; mais qui s’en soucie aujourd’hui en Europe ? Les Occidentaux sont en majorité de culture chrétienne mais qui se soucie du fait que le Christ, Jésus- Aïssa fils de Mariam des Al-‘Imrân, est Palestinien de la ville de Nazareth ? Donc un sémite ? Le christianisme est aussi arabe (au sens non ethnique de Pierre Rossi) que le Judaïsme et l’Islam. Mais ces identités culturelles vues par leurs citoyens s’opposent comme des essences. Ginette Michot a écrit un bel article qui s’intitule «on ne meurt pas de mourir» sur la problématique du peuple au Canada. Les langues ne meurent que si leurs locuteurs ne leur trouvent aucune fonctionnalité. Et lorsque c’est le cas il n’y a rien à faire sauf engager la résistance contre-nature. Je ne pense pas que le français ou l’arabe scolaire résisteront longtemps devant l’anglais et l’espagnol et peut-être même le chinois dans certains domaines ! Il y a matière à réfléchir quant au rapport de la langue et de l’économie. Il existe d’ailleurs aujourd’hui une orientation cognitive en linguistique qui prend en charge cette préoccupation. Quand les gens se révoltent c’est contre la volonté d’éradiquer des cultures et des langues, comme on réagirait par exemple contre un assassinant. Mais l’on ne réagit pas de la même manière lorsqu’il s’agit d’une mort naturelle.

 

Concrètement, en quoi consiste le travail de votre centre de recherche ?
ll Notre travail ne consiste pas à empêcher ceci ou cela d’arriver, on n’est pas outillé pour cela, personne ne l’est véritablement à travers la planète. Notre travail répond à une demande institutionnelle d’aménagement d’une langue nationale, tamazight, pour l’institution éducative. Voilà tout. L’avenir des langues nous intéresse en tant que chercheurs dans le domaine. En gros il faut penser que la situation de concurrence n’est pas nécessairement un milieu négatif menaçant. Les langues s’adapteront et prendront les fonctions que la société leur assignera. Et c’est précisément pour toutes ces raisons que l’on peut garder l’espoir, mais aussi que l’on doit être modeste dans nos objectifs d’aménagement linguistique. Les dispositions que l’on prendra avantageront ou désavantageront la position de la langue dans la société. Les mesures contraignantes dans le domaine pédagogique sont les plus mauvaises en terme de rendement. L’utilisation de la langue arabe scolaire est obligatoire depuis le début des années soixante-dix, mais est-ce que tout le monde après trente cinq ans d’obligation, utilise cette langue et partout ? Les romanciers qui écrivaient en arabe écrivent en français maintenant pour des raisons de lectorat. Toutes les études du marché montrent que le lectorat en arabe scolaire est trop faible pour tenir une activité éditoriale rentable dans cette langue. C’est la loi du marché et non pas de l’idéologie. Mais dites-moi combien lisent en tamazight ? Si tant est qu’il y aient des choses à lire dans cette langue ? Je le dis comme cela sans arrière-pensée pour dire la difficulté de l’entreprise non pas pour décourager. Les idéologies c’est une chose, la réalité et l’histoire c’est autre chose. Il est nécessaire de démythologiser notre pensée et notre identité historique.

 

Comment tamazight peut-elle devenir fonctionnelle ? Et en combien de temps, au minimum ?
ll Tamazight, à l’instar de l’arabe algérien, est déjà fonctionnelle dans le domaine d’utilisation qui est le sien. Comment le rendre fonctionnel dans les autres domaines, les domaines formels ? Cela est une question difficile. Le travail de standardisation, s’il est fait avec une rigueur suffisante, s’il ne s’engage pas sur les sentiers de la mythologie et de l’idéologie, pourrait aboutir à quelque chose d’intéressant. Il faut du temps au temps, mais quand une langue a été marginalisée depuis des centaines d’années, elle doit quand même prendre le temps nécessaire au travail sur soi.

 

Comment analysez-vous les dix années d'enseignement de tamazight dans le système éducatif algérien ?
ll L’enseignement de tamazight dans le système éducatif, depuis 1995, pose des problèmes dont on n’aurait pas soupçonné l’existence s’il n’avait été entamé. L’expérience est de ce point de vue intéressante, car elle nous montre ce qu’on doit éviter à l’avenir et notamment la précipitation dans les grandes décisions. Aujourd’hui se pose la question du caractère obligatoire ou non de tamazight, car précisément cette expérience a montré l’existence d’un rejet inimaginable au début. Mais est-ce la bonne solution ? Au début on pensait que l’on pouvait unifier tamazight et l’enseigner ainsi dans toutes les régions tamazightophones ; on pensait pouvoir enseigner tamazight en tant que matière et en tant que langue d’enseignement d’autres contenus. A-t-on aujourd’hui les mêmes dispositions d’esprit ? On pensait possible son enseignement à tous les niveaux du système éducatif, aujourd’hui pense-t-on encore comme cela ? Qui pouvait avant cette expérience relever les difficultés de réaliser un programme d’enseignement de la langue ?
Voilà pour les aspects positifs de cette expérience. L’aspect négatif le plus important à mon sens est le fait que le prestige de cet enseignement et de cette langue a été entamé auprès des apprenants dont les attentes ont été frustrées. On avait sous-estimé la difficulté réelle objective au profit de considérations purement idéologiques. On a reproduit, selon le parallèle inverse, les erreurs de la politique volontariste d’arabisation qui a abouti à une catastrophe culturelle et linguistique. Notre société est plurilingue et le restera longtemps. C’est là un grand avantage. Encore une fois, nous sommes des êtres de passion ; et nous devons devenir des êtres de raison si l’on veut tenir dans l’espace mondialisé qu’est devenu notre planète. 



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Commentaire N° : 1
Par: boukhezzar karim Le : 2010-05-07
Titre: tamazight di lakul
Pays: Algeria  

bghigh adzregh ma lan igharbazen iwslmed ntmazight di ldzayer tamanaght ?  
 
 

 
Commentaire N° : 2
Par: Kamel Le : 2010-08-18
Titre: Tamazight d assalas
Pays: Canada  

am ass-a tamazight a tsjujeg a tsenerni wa tsettef amdiq is di tmurt is  
 
 

 
Commentaire N° : 3
Par: Driassa Le : 2013-11-19
Titre: La Phénicie ou Sham(la langue)
Pays: Algeria  

Les termes paradis,rue et voie sont d\'expressions arabe écourtées(libanais-syriens)digne de leur ancêtres Phéniciens.
Paradis=(dans les terres ensorcelées)
Voie=b\'ouasle ou b\'oisle(avec la liaison)le b=v=p(baba=vava=papa)
Rue=(Haruet) حرة
 
 
 

 
Commentaire N° : 4
Par: Driassa Le : 2013-11-19
Titre: La Phénicie ou Sham(la langue)
Pays: Algeria  

Comment les européens ont chacun d\\\'eux sa langue propre,ils doivent être aider par une autre civilisation l\\\'ayant coutoyée(civilisation islamique).De même d’où vient le mot franque, la plus grande découverte est comment les quatre langues latines(Française,Italienne, Espagnole, Portugal) ont étés grammaticalisées ou accentuées et différenciée l’une de l’autre selon les……? Par qui …..? Et comment……. ? Aujourd’hui, dans les pays arabes, on parle l’arabe dialectal et l’on écrit uniquement en arabe classique.Mais transmués directement par les académiciens arabe du Sham aux francs, où le dialecte arabe Libanais-Syrien est devenu intégralement le vocabulaire et l’orthographe de cette langue ,cette dernière ne possède aucun mot grec, parce que les dialectes arabe du moyen orient n’ont pas pris de termes ni du grec ,ni du latin (Romain) ,et même ils ont participés à la création des langues latines d’une manière philosophique au moyen âge(médiéval) ,le but été religieux pour les chrétiens tant que pour les musulmans(faire savoir leur religion aux autres),digne héritiers de leur ancêtres Phénicien inventeur d’alphabet dit grec, tout autrement c’est par l’intermédiaire des langues latines ,que les mots arabes abrégés sont entrés dans la langue grec classique ,contemporain, et a bénéficiée d’une nouvelle grammaire , moi je dirai : « le français ne vient pas du grec classique», « Le français vient du dialecte arabe abréger de Sham ».  
 
 

 
Commentaire N° : 5
Par: Driassa Le : 2013-11-19
Titre: La Phénicie ou Sham(la langue)
Pays: Algeria  

Les termes paradis,rue et voie sont d\'expressions arabe écourtées(libanais-syriens)digne de leur ancêtres Phéniciens.
Paradis=(dans les terres ensorcelées)
Voie=b\'ouasle ou b\'oisle(avec la liaison)le b=v=p(baba=vava=papa)
Rue=(Haruet) حرة
 
 
 

 
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