"je suis quelqu’un qui dit qu’il faut pas mélanger la politique
et la musique...
J’ai compris que la politique sépare plus les gens que de les
réunir".
Interviewé par Samir N’ayt OUIAZAN
Marrakech- Jardins Elharti -
Le 03 Février 2015
Azul fellak Mr Akli, bienvenue au Maroc et parmi Imazighen du Maroc ; Vous êtes
notre frère et parmi vos frères et sœurs. Merci d’avoir accepter notre
invitation à Amazighworld.org
Q:
Pour commencer, je voudrais que vous nous parliez un peut de votre cursus
artistique, comment avez-vous commencé comme artiste ?
R :
Azul fellawen ; J’ai commencé par les chants de ma mère, elle chantait des
chants spirituels ; J’ai grandi comme ça, après je faisais la musique dans la
rue, j’ai grandi avec le ballon et la guitare. Puis j’ai commencé en faisant mon
premier concert à l’âge de 13 ans au lycée et je suis parti en France les années
80 ; A paris, j’ai fait la musique dans la rue aussi quelques années où j’avais
pas de papiers, j’ai fait beaucoup de métro et de places publiques en chantant
pour les touristes ; Et puis un peut plu tard, j’ai commencé à voyager, j’étais
en Californie quand j’avais mes papiers, et à San-Francesco, et c’est là que
l’idée de la fusion musicale m’est venue, j’ai cherché des musiciens algériens
pour jouer avec eux mais il y en a pas, j’ai alors fais ma première fusion qui
n’était pas trop réussite parce que j’avais pas d’expérience, j’ai fais ça
accidentellement et mon premier groupe est né en USA avec les américains et
aussi des marocains surtout des percussionnistes, et c’est comme ça que ce qu’on
appelle « la musique du monde » a démarré.
L’idée de fusionner ma musique est venue en 1993/1994 ; Et en 1995 quand je suis
revenu à Paris, on m’a proposé de signer un contrat avec un label français qui
s’appelle " Alsur " , j’ai fait mon premier album qui a beaucoup marché
chez la communauté Kabyle . Ma rencontre avec " Manu CHAO " à changé beaucoup de choses, c’est lui qui a produit mon deuxième
album, on a chanté ensemble pendant 3 ans et un jour il a écouté une chanson qui
s’appelle : « Good morning Chetchenia » et m’a dit qu’il aimerais produire mon
album et c’est avec lui que j’ai commencé une aventure musicale. Depuis, ma
musique à beaucoup muri en faisant notamment beaucoup de festivals, les plus
grands en Europe : festival de Nyon en Suisse, London Festival Jazz, le
festival de Peter Gabriel… , après, j’ai fait une grande tournée avec "
Femi KUTI " en
Angleterre, dans toutes les grandes salles et puis d’autres festivals partout en
Europe, au Canada, en Afrique du Sud et en Algérie et en 2007 je suis venu au
Maroc participer au Festival « Timitar » et à la première édition du festival de
« la tolérance » au côtés de plusieurs grands chanteurs. Et là je suis au Maroc
encore une fois invité par « l’association des amis de N’ba » et c’est un grand
plaisir.
Q :
Comment avez-vous choisi votre style musical actuel, et pensez-vous que les
styles musicaux Amazighs intègrent facilement l’internationale ?
R :
Bien sûr, et c’est ce que je fais, si j’ai fais les plus grands festivals
d’Europe, c’est parce que ce sont des festivals très importants. Comme j’ai dit
tout à l’heur , quand j’étais aux USA, ma musique n’était pas assez mûre, mais
avec le temps, en faisant des festivals et en rencontrant plein de musiciens
différents, ça vient .
Dans mon groupe, j’ai toujours fusionné les musiciens ; Il y a Adil (
percussionniste ) et Hicham ( bassiste ) ce sont des marocains et j’ai travaillé
aussi avec " Hervé BOUCHER " et autres musiciens
français ou autrichiens, j’ai eu la chance de travailler avec des jazz-mens et
autres.
En fait, la musique c’est comme une plante qu’il faut toujours arroser pour
qu’elle murisse et donne des fruits.
J’ai eu aussi la chance de travailler avec " Steve Hely
"
, un grand arrangeur anglais, et puis c’est ma volonté qui m’a amené vers la
fusion, parce que je suis quelqu’un qui aime le monde, qui aime les peuples.
Quand je vais dans un pays, je fais pas le concert et je rentre chez-moi,
souvent je reste une semaine à quinze jours de plus pour connaitre les gens,
j’aime m’habiller des habits qui viennent d’ailleurs, aussi manger la nourriture
d’ailleurs, j’aime toutes ces couleurs et je crois que ce monde est en fait un
seul pays, un pays d’humains où on est tous différents, j’aime cette différence
culturelle qui est pour moi très importante.
Q :
Où pensez-vous que l’artiste Amazigh est plus à l’aise de point de vue moyens et
appuie, sur Tamazgha ( en Kabylie, au Maroc …) ou à l’étranger ?
R :
Au Maroc, je ne connais pas la situation pour dire que les musiciens ici ont des
moyens ou non, je commence juste à connaitre ; De toute façon, les musiciens
dans le monde entier se distinguent, il y en a qui ont des moyens et d’autres
qui ne les possèdent pas ; Ceux qui ont des moyens, c’est ceux qui tournent et
gagnent leur vie avec la musique, après c’est quoi les premiers moyens d’un
musicien ? , c’est la maison des jeunes, la maison du quartier, la guitare sous
un figuier … ça c’est les premiers moyens, mais il faut savoir que c’est au
musicien lui-même de chercher et de travailler sa musique pour qu’elle devient
très professionnelle et ça c’est basé sur la volonté d’un musicien ; Comme un
chercheur, un médecin ou un ingénieur, il y a un travail personnel à faire,
très important, il n’y a pas que l’école, en sortant de celle-ci, un travail
très personnel reste à faire.
"je suis quelqu’un qui dit qu’il faut pas mélanger la
politique et la musique.......J’ai compris que la
politique sépare plus les gens que de les réunir."
Q :
A votre avis, est ce que la chanson Amazighe, surtout militante, se porte bien
actuellement ?
R :
La musique militante ? , je sais pas à quel niveau et où ; Je sais que chez nous
en Kabylie on a beaucoup folklorisé, la musque à de ce fait perdu beaucoup de
public ; Au Maroc, je sais pas, je ne connais pas pour en parler, par contre je
suis là pour découvrir. Je trouve que la musique se porte bien dans le monde,
c’est aux musiciens de faire leur volonté que ça se passe. C’est les gens qui
cherchent après un musicien/chanteur, c’est pas au musicien d’aller chercher
après un public, c’est selon son travail ( le chanteur ) .
Ce qui est beau dans la musique, c’est qu’elle ouvre les frontière, et on se
rencontre entre humains, ça c’est très important pour moi ; Au-delà de ça, je
suis quelqu’un qui dit qu’il faut pas mélanger la politique et la musique,
parce que pour moi j’adhère pas à la politique, peut important l’étiquette.
J’ai compris que la politique sépare plus les gens que de les réunir. Moi je
suis pour une harmonie musicale humaine, je crois que la musique réuni les gens,
y compris en France, quand je chante, il y a peut de tout, des fois ça m’a
étonné qu’il y avait carrément des gens, on va dire, des partis d’extrême droite
qui sont venu écouter ma musique ; Voilà, je trouve que c’est la plus belle arme
et la plus belle politique pour réunir les gens. Moi je suis de cet avis.
Q :
Vous êtes invité au Maroc à Mellab par « l’association des amis de N’ba » pour
rendre hommage à ce grand artiste qui est Nba OULARBI qui nous a quitté, je
voudrais un petit mot d’hommage à ce grand artiste.
R :
J’était surpris par ce grand bon homme – grand jeune homme – parce qu’il est
parti à l’âge de 28 ans, ça m’a surpris qu’il y a tout un peuple derrière lui
après sa mort. Je crois qu’il est devenu un symbole et un leader d’une cause
culturelle et identitaire. Pour l’instant, je ne connais pas bien sa biographie,
mais de ce que j’ai vu chez les gens, c’est qu’il est vraiment populaire, c’est
vraiment un chanteur populaire comme il existe d’autres en Kabylie, pour nous
Matoub LOUNES et comme d’autres ; Je crois qu’il s’est battu pour une cause
humaine et culturelle, et j’ai trouvé beaucoup d’humanité dans ce qu’on m’a dit
de lui, c’est quelqu’un qui est à l’écoute de tous les sons d’amour et autres ;
ça m’a surpris, il mérite d’être connu dans le monde entier, malheureusement il
n’est plus là, il est resté un symbole et c’est très important.
"Si les politiciens divisent, les artistes réunissent"
Q :
Je voudrais un dernier mot au public marocain et aux jeunes générations
d’artistes et militants au Maroc et sur Tamazgha en général.
R :
Nous les Kabyles, on a trop mélangé la politique qui nous a séparé et nous a
éloigné de notre objectif, parce qu’une fois qu’on sépare un peuple y a plus
d’amour ni fraternité. J’ai un conseil à donner aux artistes, on est là pour
réunir les gens, il ne faut pas qu’on se prennes pour des politiciens, on est
pas des politiciens, il faut qu’on défend des valeurs humaines, culturelles et
historiques, et le temps fera les choses et le combat sera plus positif ; Mais,
si on mélange la politique à la musique, ça peut séparer tout le monde ; Je
connais des gens de même famille qui sont de différents partis politiques, ils
se sont battus . Moi, je ne suis pas pour la politique, je ne suis que pour les
valeurs humaines, culturelles et musicales, c’est tout ce que je sais faire,
c’est mon doctorat à moi que j’ai fait – doctorat de la rue - c’est sûr que je
m’intéresse à des causes humaines/humanitaires. J’ai fais des choses avec
"John BIRKIN " pour les enfants de la Tchétchénie,
j’ai chanté pour la paix entre palestiniens et israéliens . Je suis pour la
paix, la politique je ne pourrais pas l’assumer parce que je ne sais pas la
faire, et comme j’ai dis « si les politiciens divisent, les artistes
réunissent » .
Q :
Est-ce qu’il reste une question que vous auriez aimé que je vous pose, mais j’ai
pas fait ?
R :
Est-ce que j’aimerais bien vivre au Maroc, peut être ? ; Je trouve qu’il y a une
culture Amazighe très importante dans cette région que je viens de connaitre, je
trouve que c’est magnifique. Et puis si, j’aimerais bien vivre au Maroc ; Pour
moi, le Maroc et l’Algérie n’ont aucune différence c’est sûr, je suis étranger
en France et au Canada mais pas au Maroc, on est des frères et on a tous la même
tête. Je suis content que la musque casse les frontières et j’espère qu’elle les
cassera plus, et qu’à cette Afrique du Nord on est tous des frères, des humains,
des Amazighs, des enfants de cette histoire.
J’étais triste quand j’étais à Mellab, c’était à 40 Km d’Algérie mais je pouvais
pas y aller, ça m’a beaucoup touché. Mais j’étais content de découvrir des
frères Amazighs, la cause est encore une fois la politique. J’espère que
l’artiste l’emportera et que l’harmonie l’emportera et que cette Afrique du
Nord, Tamazgha, sera enfin réunie, la grande Afrique du Nord qui s’appelle le
monde et qu’enfin Tamazgha trouvera sa place qu’elle mérite dans le monde ; Elle
a une histoire qui date des milliers d’années et est toujours là avec un peuple
toujours là aussi, on défend tout simplement notre existence humaine, culturelle
et historique.
Q :
Merci de nous avoir reçu, soyez le bienvenu chez vous au Maroc parmi vos frères
et sœurs.
R :
Tanemmirt, franchement, à aucun moment donné je n’ai vu aucune différence, je ne
me pause aucune question même à la douane ni quelque part comme quand on va dans
des pays différents, dès qu’on voit des douaniers qui nous ressemblent c’est pas
étranger. Le Maroc c’est ma maison, c’est vrai que nos langues se sont
différenciées après tant de milliers d’années, des mots différents, mais la
musique est la même, nos regards, nos cheveux … je ne vois aucune différence,
qu’il y a des berbères blanc ou black, c’est ça l’Afrique du nord.
Q :
Un petit mot en Tamazight Kabyle !
R :
Tanemmirt swattas, farhagh attas, aqlen d ass agi ak d watmaten-iw Imazighen n
Marrok, farhagh garawen, tmennigh add ughalegh tikelt nniden, ad iligh garawen
ad lemdegh ayen ur ssinegh ara, bdigh alemdegh Tamazight n Merrok, c’est une
grande richesse pour nous, tanemmirt s wattas.
Interviewé par Samir N’ayt OUIAZAN
Marrakech- Jardin Elharti -
Le 03 Février 2015
L'INTERVIEW EN VIDEO :
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Commentaire N° : 1 Par: Idir62 Le : 2015-03-01 Titre: Mettez vos talents de musiciens au service des cases justes Pays: France
M. Akli D., il faut plutôt mettre la musique au service de la politique et des causes justes, parce que tout est politique dans la vie. Comme on dit, si vous ne vous occupez pas de politique, la politique s'occupera de vous.