…L’effort individuel vers la perfection n’est pas seulement « le commencement de tout » il est la continuation et l’aboutissement de tout. Il englobe, il édifie et il conserve tout l’organisme qu’est l’identité, et seul il a ce pouvoir. C’est pour lui que s’applique la formule de vie civile d’une nation, car elle n’a été créée que pour le conserver comme valeur révélée originelle.
Et lorsque se perd dans un peuple le besoin d’un perfectionnement général des individus dans l’esprit qui a fait naître cette nation, alors progressivement disparaissent toutes «institutions civiles» car il n’y a plus rien à conserver.
… Notre peuple s’est donné un nom «Amazigh» ; il y’a là plus d’un nom, il y’a là une idée qui vaut pour tout son avenir. Vous vitupérez impitoyablement le Maroc pour son manque d’organisation. Mais qui jusqu'à présent qui l’a empêché de s’organiser, tout au long de ces derniers siècles et tout particulièrement des cinquante dernières années? Qui, si non vos pareils, les nationalistes arabes qui depuis qu’ils sont arrivés, n’ont cessé de croître et prospérer sur la terre de Tamazgha et qui maintenant nous obsèdent plus que jamais? Qui refuse railleusement de reconnaître jusqu'à l’existence de ces évidences, qui se refuse à les discerner? Qui a prétendu refaire notre peuple en s’imaginant « l’élever jusqu'à soi», en en faisant tout un peuple d’arabes et de musulmans à son image, un peuple soumis, en détachant de temps en temps de la masse du peuple un individu après l’autre pour le pervertir et en faire un arabe ne fusse que par les basques de son uniforme que par le tarbouche et la barbe? Je ne veux pas dire par là qu’un arabe est un homme pervertit; (je laisse le soin d’un tel jugement aux arabes eux-mêmes), je dis seulement que transformer un amazigh en arabe comme le prétendent les arabistes de tout bord; C’est la plupart du temps le pervertir, purement et simplement. Or c’est bien là à quoi se ramène tout l’idéal de leur programme d’action : détacher de la masse un individu après l’autre- voyez l’absurdité! Les quatre vingt millions d’hommes de notre peuple, ils voudraient ainsi les effeuiller et les refaire? Se peut- il que vous pensiez sérieusement que notre peuple, dans toute sa masse, consentirait à devenir quelque chose d’aussi impersonnel que ces messieurs «berbères arabes».
P S – j’ai oublié seulement de dire que j’ai un peu truque ce texte de Dostoïevski (1880) c’est une manière aussi de rendre hommage à ce grand écrivain.