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Observatoire de la presse

TAHMIDDOUCHT Un regard qui traverse le temps

Mohamed EL MANOUAR
tapmidduct
TAHMIDDOUCHT Un regard qui traverse le temps

Préface
Ali Bougrine

 

Préface

Avant d’aborder l’immense personnage de Tahmiddoucht, je souhaite dire un mot sur l’auteur dans sa quête de son identité.
Mohamed El Manouar est l’auteur d’une variété de contributions publiées dans la presse nationale et internationale. Il est également l’auteur de plusieurs ouvrages dont notamment : « Le Sud-Est marocain » (Phédiprint, Rabat, 2004),  « Tamazight, la constitutionnalisation ou la mort » (Bouregreg, Rabat, 2006), « Tahmiddoucht, un regard qui traverse le temps » et d’autres encore qui paraîtront sous peu : « Parcours d’un combattu », « Au- delà des mots », « Bou Gafer, la citadelle inviolable », « les conventions villageoises dans le sud-est marocain », « la poésie amazighe, cas des timnatin de Sud-est »…
Préoccupation de tout instant, cette quête identitaire le poursuit à l’obsession.
Tahmiddoucht, perle parmi les perles, lui offre un sujet de prédilection pour mener une réflexion sur la problématique de cette dégénérescence qui a frappé les siens. Il y trouve un écho inespéré, quoique ne donnant aucune solution mais le même constat. Il a trouvé au moins une personne qui partage son profond désarroi, une personne qui a le même regard.
Quel soulagement de ne plus être seul !
Des nuits et des jours passés avec « cette mémoire vivante » il a pu démêler l’écheveau de son propre questionnement.
Il le livre aux siens dans un silence froid et assourdissant en leur disant simplement : voilà ce que nous étions et voilà ce que nous sommes devenus.
Tahmiddoucht l’a explicité pour lui et son mérite à lui est de le transmettre aux siens.
Quelle aubaine de trouver quelqu’un « avec qui parler ».
Ce message transmis viscéralement devient soulagement puisqu’il est vérité, sincérité et authenticité.
Ainsi le travail des mois, à mille lieues de son foyer, a pu lui apporter ce réconfort de trouver « un alter ego » pouvant lui parler de cette énigme qui le hante et qui vient de trouver une formulation cohérente.
Tahmiddoucht, la perle, est un être effacé, quelconque, que rien ne prédestine à côtoyer.
C’est l’instinct quasi animal qui les a rapprochés.
Le hasard n’existe pas, la volonté explicite ou subconsciente est réelle, est moteur vers la réalisation de l’être.
De cette rencontre, a priori hasardeuse, est né ce magnifique ouvrage qui se propose de semer une graine féconde de ressaisie et de renaissance.
Merci à l’auteur pour son opiniâtreté.
Tahmiddoucht est un être frêle, ratatinée, burinée par des rides profondes tracées dans ce visage très souvent exprimant l’absence dans un calme serein et détaché.
Tahmiddoucht est un baobab de 2.000 ans.
Tahmiddoucht est notre bonheur par la découverte de ce que nous étions, elle est notre malheur et mauvaise conscience par ce  que nous ne sommes plus.
Tahmiddoucht, quand elle parle, il faut l’écouter et la regarder pour la comprendre.
Dans une langue d’une pureté absolue, elle s’exprime avec une fluidité qui n’est plus, avec une précision qui n’est plus, et ce qui « n’est plus » s’applique à  des mots, des tournures, des images, des proverbes et surtout des silences qui suggèrent un non-dit, autrefois éloquent aujourd’hui inaccessible.
Son visage, sa mimique et sa gestuelle, relevant de la plus haute  rhétorique en son temps, nous rappellent des réminiscences de notre passé révolu.
Elle nous a rappelé, dans notre art de la communication, toute l’importance de la gestuelle, de la mimique, du silence et de la suggestion du non-dit.
Tahmiddoucht a aujourd’hui 107 ans.
Sa vie, au plan matériel, a été d’un dénuement constant. Sur les hauteurs d’Ait M’hammed surplombées par Azourki la vie a été et reste rude.
Elle est née dans une famille modeste comme toutes les familles de cette « humanité ». Gamine elle a bravé la sélection naturelle. N’ayant pas connu d’enfance, elle a entamé immédiatement l’âge adulte en tant que bergère et adulte en devenir.
Elle a poussé dans ce milieu hostile à l’instar du règne végétal sur cette terre rocailleuse, très peu généreuse et soumise à des hivers rigoureux.
A l’exemple du chêne luttant pour la survie développant des racines infinies dans les interstices des diaclases, elle a tenu et tient à la vie.
Un chêne nain, rachitique, noueux mais vivant.
Tahmiddoucht une voix réelle ou une voie d’outre-temps ?
Tahmiddoucht un être commun ou en voie de disparition ?
Tahmiddoucht un être réel ou gardienne éternelle de notre mémoire collective dans une grotte mystérieuse accessible à notre seul imaginaire et ainsi sauvegardant notre salut et notre âme.
Tahmiddoucht est notre dinosaure qui traverse le temps. Elle est prête à révéler à notre archéologie naissante tous les mystères de notre âme.

Tahmiddoucht est le sanctuaire et dépositaire d’un pan de notre histoire jamais écrite ou déviée et falsifiée.
Tahmiddoucht se rappelle du Siba et en parle dans tout ce qu’il a de violant, d’inique, d’humain, d’authentique, de généreux et surtout de la clarté des règles du jeu où tout membre est acteur.
Tahmiddoucht parle d’aujourd’hui où la rapine est quotidienne, la violence s’exprime sous toutes les formes directes et insidieuses, les membres de la « société » passifs et marginalisés y compris dans leur langue et leur façon d’exister.
Tahmiddoucht ne comprend plus rien ou plutôt comprend qu’elle n’appartient pas au monde actuel : ni à son message plein de perfidie et exprimé dans une langue qu’elle comprend à peine, ni à la cohérence entre ce discours et sa traduction dans les faits.
Tahmiddoucht constate, avec distance, la laideur de la métamorphose du monde et surtout des siens.
Tahmiddoucht ne désespère pas, dans son calme elle plaint les siens puisqu’ils se sont reniés en abandonnant leurs propres valeurs universelles.

Tahmiddoucht n’imagine pas que les siens fiers et braves puissent vivre un tel revirement, prêter l’oreille à des charlatans, à des usurpateurs venus d’ailleurs, se laisser dépouiller naïvement de leurs biens et de leur culture. 
Tahmiddoucht, fantôme parmi les fantômes, a vécu simplement. Pour elle à défaut de faire face à tous les besoins matériels, elle les a réduit au minimum pour vivre en conformité avec elle-même et avec ses valeurs.
Tahmiddoucht n’a pas fait d’études, elle a été à l’école de la vie. Les leçons y sont enseignées ou plutôt administrées avec discipline et rigueur. Leur quintessence n’est accessible qu’à une minorité d’élu(e) s. 
Tahmiddoucht, gamine a été bergère exploitée et maltraitée, adolescente mariée  et « bête de somme », vieille abandonnée sans ressources poussée à la mendicité.
Tahmiddoucht, calme et sereine, est-elle le produit de ce parcours exceptionnel qui l’a façonnée ou un être d’exception pouvant vivre toute la condition humaine en gardant son authenticité et la beauté de sa lueur originelle ?
Tahmiddoucht n’a jamais demandé rien à personne, c’est son secret, c’est sa force, c’est sa façon d’être hors d’atteinte, hors d’emprises.
Tahmiddoucht par son détachement et son indépendance a porté un regard perçant, sans condescendance et sans concession sur les siens. Elle a le jugement froid et objectif de l’Histoire, un jugement sans appel.
Tahmiddoucht femme fragile dans son fond, femme forte par ses convictions et par ses actes, femme fondamentalement humaniste, femme de valeur et d’authenticité, femme fière de tout son vécu et de ce quelle est.
Tu as vécu, sans geindre, toutes les vicissitudes de la vie.
Tu as vécu dans des gourbis avec des chèvres et des poules où la fumée âcre prend à la gorge, où des conditions d’hygiène minimales sont absentes.
Tu as connu la faim et le froid.
Tu as su présenter une résistance sans faille à tout ce qui peut porter atteinte à l’intégrité de ton âme.
Tu as certainement fait face aux sarcasmes et fatuités des gueux qui ont pu, pour un moment te contrarier avant d’évaluer leurs légèreté et futilité.
Après tu as su identifier et lire sur leurs visages « leurs mesquineries » mais sans plus t’atteindre.
Tu es espoir de notre renaissance.
Tu es espoir du réveil de notre conscience.
Tu es notre mauvaise conscience.
Merci d’avoir existée,
Merci d’être restée toi-même,
Merci d’avoir été, dans ton anonymat, pour nous et pour tous les Hommes libres, un symbole d’authenticité et de liberté.
Merci  à Mohamed El Manouar pour Tahmiddoucht.

Ali Bougrine


Préambule.

Ce récit romancé, si l’on veut dire, n’aurait jamais vu le jour sans un concours de circonstances, pour le moins, imprévisibles. Une rencontre, par l’entremise de mon ami, un amazigh convaincu, hardi, Said El Aarbaoui qui m’avait mis en contact avec un jeune cinéaste, Ivan Boccara, juif marocain qui vit entre Paris et Marrakech. Ce dernier m’avait sollicité pour assurer la traduction des rushs d’une soixantaine d’heures filmées dans le Haut-Atlas marocain. L’objectif étant de réaliser un documentaire de 95 minutes.
Après plusieurs rencontres à Rabat et à Casablanca, je me rends à Tabia, à quelques lieues de Imi n Ljamâa, sur les berges de wad Laâbid.
Nous avons logé chez une famille dans deux chambres construites en pierres dont l’une m’est réservée pour dormir et pour travailler. L’autre, pour Ivan et Abdellah, mais aussi pour les besoins de notre restauration, de nos discussions interminables qui se poursuivent, tard dans la nuit.

Un périple qui aura duré presque une heure de piste sous un soleil d’aplomb, dans une voiture louée pour la circonstance qui nous a conduit sur une piste caillouteuse. Une piste torrentueuse qui débouche sur un site des plus insolites, merveilleux, simplement sublime. Nous avons été reçus dans l’allégresse des gens hospitaliers et avenants que sont les imazighen. Le lendemain, vers la fin du mois de juin 2003, je me mets au travail devant un ordinateur portable, un magnétoscope et un téléviseur. C’était un événement, hors du temps, pour les jeunes et les moins jeunes du village. Les yeux hilares, ils venaient tous les soirs, m’accompagner dans cette pérégrination, cette remontée du temps, cette besogne, combien difficile et astreignante, celle de traduire de l’amazighe au français, les propos de Tahmiddoucht et de certains de ses proches, objet de deux cartons de cassettes VHS.

Ce fut un travail de titan. Pour traduire une heure d’entretien, il me fallait deux journées de 16 heures chacune. Pour me familiariser avec le « parler » de la région (sur certains termes), Abdellah El Hamri m’a été d’un concours précieux. Il s’agissait de saisir quelques nuances, quelques subtilités du personnage.
Quel bonheur que d’avoir rencontré une dame, une grande dame de ce calibre ! J’ai, dans l’allégresse, découvert un personnage subtil, insaisissable, impressionnant, hors du commun. Lalla Fadma Addi Tahmiddoucht, vieille bergère des ayt Isha dans le Haut-Atlas central, est plus que centenaire. Elle vit encore en cette année 2006.
Une odyssée qui aura duré plus de six mois de stress, de fatigue, d’hésitation, de recherche dans le but de saisir l’insaisissable et certainement de traduire, de trahir dans la lettre, non dans l’esprit, la pensée volatile et insaisissable d’un personnage hors du temps, dans le temps, malgré le poids de l’âge, l’écume d’un passé lointain. Un mirage que j’ai suivi, non sans peine, de longues nuits, de longs mois durant.

En somme, il m’importait, dans cette contribution, de donner la parole, de faire témoigner une bergère plus que centenaire, femme amazighe, ne connaissant rien du monde citadin et partant, lui permettre de s’exprimer à sa guise, dans sa langue, et porter un regard sur les différentes époques qu’elle a vécues, sur les sujets qui la hantent aujourd’hui, qui la préoccupent et qui sont, de façon étonnante et sublime, d’une actualité criarde.
Il ne s’agit pas, loin s’en faut, d’une traduction littérale des propos recueillis auprès du personnage, lalla Fadma, mais plutôt d’une traduction du dit et du non-dit. Une transposition de la lettre et de l’esprit, élaborée à partir du vécu, du réel des imazighen, domine ce récit, certes, individuel, mais surtout collectif à plus d’égards.
D’autre part, la formulation littéraire de la narration se préoccupe plus à coller à l’esprit amazigh dans ses métaphores, ses subtilités, ses tournures, loin de l’intellectualisation des personnages en vogue dans certaines productions littéraires.
Le film documentaire finalisé, le cinéaste décide d’organiser une projection avant première à Lalla Fadma, chez elle, non loin du lieu de tournage, car, elle a encore été contrainte de changer de gourbi. Ce fut une véritable expédition. Avant de charger nos ânes, nos bêtes de somme, je lui avais posé une dernière question : lalla Fadma, de quoi as-tu besoin. Elle me répond de cette façon stoïcienne et imprévisible : « d’un peu d’eau pour boire et de quelques troncs de tasaft, de bois, pour réchauffer mes vieux os ». J’en reste coi, abasourdi, perplexe, mais fier de cette réponse laconique, à méditer…Lalla Fadma ne s’est pas démentie.

Et, c’est à partir de ce travail, ces rencontres, ces insomnies, que l’idée d’en faire une sorte de roman, si l’on peut dire, est née et a fait, depuis ce déclic, son chemin dans une mouture qui se fonde, au-delà de ce qui est dit, sur notamment, le non-dit plus substantiel, imagé et métaphorique de la condition amazighe, humaine et universelle, dans certains aspects de sa culture et de sa vision du monde.

 


(Dernier chapitre de la publication)
Tahmiddoucht et le mal des siens

J’écoute mon amie Chetto dire, dans une langue qui n’est pas sienne, que ces rejetons ne cessent de l’intimider, de l’insulter, de l’harceler, de lui intimer l’ordre de rester muette, d’aller habiter ailleurs, comme si ce sont eux qui avaient construit cette demeure… La rage de ne pas pouvoir vaincre, l’envie de ne plus être, à coup sûr, les tuent.
Sur la terre de l’injustice, de l’iniquité nous sommes ici-bas. Ils n’ont de cesse de médire, de ne dire et de ne colporter que des mensonges sur notre compte, falsifier notre histoire, ignorer notre passé glorieux, nous défigurer, banaliser nos toponymes, arabiser nos prénoms, nous imposer les leurs, interdire les nôtres, considérer notre langue comme un patois vulgaire, la leur sacrée, folkloriser nos traditions, nos coutumes, les leurs authentiques, nous imposer le déni de ce que nous sommes, nous minorer dans notre majorité unie par une volonté qui commence à poindre, à vaincre les turpitudes de l’obscurantisme, de l’absolutisme, de la pensée unique, du néant qui les réconfortent dans leurs ténèbres qui enfantent les excès, les rapines et,  que de perversions de toutes sortes !

Chetto dit aussi qu’ils ont voulu lui jeter ses affaires dehors, l’excommunier, la bannir, la répudier de chez elle. Certes, un chez-elle rustre, mais que de glorieux souvenirs il rappelle. A force d’y penser, je peux affirmer que celui qui a ses enfants ne peut rien craindre de toutes ces infamies. Bien sûr, ils se doivent d’être à la hauteur de cette lourde charge, être unis pour vaincre l’adversité et imposer, tant bien que mal, la diversité, combien salvatrice, riche et enrichissante.
Lalla Fadma, n’est pas jetée, loin s’en faut, seule ici-bas. Ses racines proviennent du fond de l’histoire, de la profondeur millénaire de cette terre, de sa terre, de ses montagnes.

Lalla Fadma ne saura jamais qu’elle provient d’un cosmos, jetée dans les entrailles de cette terre d’Afrique, la terre des imazighen, le terreau de la liberté et de l’épanouissement dont elle garde encore toute la substance. Elle ne compte que dans les chiffres de l’éphémère, de l’illusoire. Et pourtant, elle a derrière elle une épaisseur de dix mille ans d’histoire, n’en déplaise à certains de souche aléatoire, superficielle. Elle croit simplement être plus que centenaire. Et pourtant, la myopie de la profondeur de l’histoire cache des horizons souvent salvateurs, prévoyants de ce qui pourra advenir. Sa semence est essaimée dans les vallées et les monts environnants. Ses racines sont solides, profondes, tentaculaires. Seules la foi et la raison font d’elle l’histoire, la vraie nature de ce qu’elle est, une femme amazighe qui porte un regard sans concession sur son monde fait de bonheur, d’amour, de privation, de manque ; un monde qu’elle a voulu survoler sans s’y attarder.
Lalla Fadma n’épargne point de porter un regard sur un autre univers qui n’est point le sien, qu’elle scrute avec patience stoïcienne, qu’elle rejette, dépravé, corrompu, dépourvu des valeurs qui sont les siennes.

Lalla Fadma ne cesse de dire, de penser et de ruminer constamment une évidence qui la hante :  « il est temps de partir, de voyager dans un autre, réel, retrouver les miens, car beaucoup des miens d’ici sont morts, défigurés, subjugués, morts-vivants, jetés sur la chaussée boueuse, infecte de l’histoire. Et tant que je vivrai, je garderai ma langue et m’en servirai ».
Lalla Fadma a conscience que les temps changent. Haletants, ils se paupérisent de valeurs, d’humanisme, de culture. Pour elle, dans sa profonde conscience, la seule qui vaille, son souhait est de partir, loin de ce monde, retrouver la quiétude, la paix et le silence.

Lalla Fadma n’a plus qu’une seule envie, avoir un peu d’eau pour se désaltérer, garder une voix intelligible, quelques branches de bois pour réchauffer ses vieux os, se revitaliser. De notre dernière rencontre en face du grand Azurki, vêtu de sa belle robe d’un blanc immaculé, s’appuyant sur sa canne, de stature digne, d’un regard perçant, Lalla Fadma me confie dans la sérénité de son âme, ce vœu qu’elle voudra que je garde, que je transmette à la postérité.
Lalla Fadma est de cette seule espèce qui ne se meurt jamais car, si elle devait mourir, elle le serait, depuis des millénaires déjà. Elle a côtoyé beaucoup d’autres avec lesquelles elle a partagé moult choses, avec lesquelles elle a vécu parfois en bonne intelligence, souvent en conflit. Elle en est sortie toujours plus rassurée, plus forte. Elle a résisté à toutes les subjugations, même des plus abjectes. Les autres se sont éteintes. Elle est vivante, vivace et vigoureuse.
Lalla Fadma, tu as la peau dure. Tu ne pourras jamais disparaître comme une vulgaire épave.
Point fugace, tu renais de tes cendres. Forte et invincible, ta substance est inaltérable. 
Elle jaillit du plus profond de l’humanité, de l’universalité, de la modernité. Elle est loin de l’adversité. Elle est magnanime, accueillante, tolérante et conviviale.
Sans concession, massive dans sa substance, elle est de celles que l’histoire visitera, et, sans elle, l’histoire ne serait qu’hybride et sans consistance.

Lalla Fadma, tu es notre symbole, évanescent mais réel. Tu es, plus que jamais, vivante.
Pieds joints, tes détracteurs finiront par se rétracter. Se croyant battre. En retraite seulement ils battent.
Lalla Fadma, tu es notre langue qui s’épanouit.
Tu incarnes notre longue existence.
Tu rajeunis par les tiens.
Les tiens prolifèrent.
Les tiens se doivent d’être, même combattus, battants, intrépides et trempés à l’égal de l’acier.
Lalla Fadma, tu portes un regard incisif, perçant sur ton monde. Un monde fait d’humilité, d’humanisme, de fierté, de liberté et de travail assidu. Quand tu étais en mesure de le faire, tu ne demandais rien à personne.
Lalla Fadma, que de boulets tu traînes.
Des boules glaciales t’étouffent.
Mais, jamais, tu ne t’es laissée bercer d’illusions.

 Dans ta verve poétique, tu t’emploies à communiquer aux tiens, nombreux et essaimés, nombreux et déchirés, ta nostalgie des temps anciens, tes inquiétudes, ta confiance, tant soit peu, sur l’avenir qui nous guette.
Lalla Fadma, tu nous invites tous, ensemble, à nous assumer, à rester dans notre substance, vigilants, tolérants, pacifistes, ouverts sur les mondes qui nous entourent, les mondes qui risquent de nous faire oublier ce que nous avons été, ce que, pluriels des nôtres, ils sommes re-devenus.
Lalla Fadma, jamais tu ne peux être ce que tu n’es point. Jamais, tu ne peux devenir ce que tu n’as jamais été.
Lalla Fadma, croyante, moine, laïque, tu es notre gloire, notre lumière qui ne cesse de revenir poindre.
Tu  égayes notre solitude, notre présence, notre persistance assourdissantes.
Tu es notre pensée angoissante qui nous point.
Confiant de ce que nous étions, nous sommes, tu nous invites sur tes cimes verdoyantes pour mieux apercevoir librement le monde qui nous entoure, qui nous guette, nous épie d’un regard méprisant qui ne dit point mot.
Tu nous apprends à persévérer,  à rester ce que nous étions de tous les temps.

Lalla Fadma, glorieuse tu es.
Glorieuse, Lalla Fadma, tu resteras.
Reine de toutes les reines tu es.
Pour l’éternité, reine, tu resteras.
Tu vaincras tes détracteurs insidieux.
Des tiens, certains se perdent, se morfondent, corrompus et obséquieux.
Mais, rentrera au bercail la chèvre égarée.
Point de salut, l’avenir est dans notre passé, notre fierté...que nul ne peut atteindre…

Mohamed EL MANOUAR


De g. à d. Mohamed El Manouar, Abdellah et  Lalla Fadma (déc. 2005).
  Historien, politologue, gestionnaire, élu communal, Muhmmad u Muh n’ayt Lhu, n’ayt Taddart, dit « Mohamed El Manouar » est natif du village Amednagh chez Iwrtguin n Dades, dans la commune rurale de Lakhmis n sdi Buyhya qui jouxte Igherm n Imgun, province de Ouarzazate dans le Sud-Est marocain.
         Après avoir servi dans l’Administration marocaine, à l’intérieur comme à l’étranger, pendant une trentaine d’années dans plusieurs secteurs, (administration, communication, financement) ! renoue avec sa passion d’écrire, sa passion éternelle, de toujours.

 

      


Le temple du Zen

Tahmiddoucht ?
Dinosaure, peau parcheminée !
Une hère plus que vieille.
Une carcasse à jeter à la poubelle !
Bergère inculte des monts de l’à haut.
Vie sans saveur,
De quelque femme sans demeure.
Sentence nulle,
De piètres maestri.
Voilà-t-il, ses yeux perçants,
Son regard,
Sa posture altière,
Et sa maître-leçon !
Tel l’Atlas,
Elle écrase, de son âge,
Un siècle et un autre.
Quand et comment,
Sublime dénuement,
As-elle pu la Bergère,
Dompter le temple du Zen ?
L’intello bat de l’aile ;
Myope, il va, dans ses grimoires,
Loin chercher,
Ce qu’elle, de la main, peut toucher.
Tahmiddoucht, la perle,
En Tamazgha, n’est pas rare.
Tihmiddouchin, moult il y en a.
Muettes,
Il faut leur donner la parole !
C’est la Mère, la Grand-Mère ;
C’est l’Aïeul,
De  temps oubliés,
De temps inconnus ;
C’est Tamazight.

Hha Oudadess
Rabat le 22-11-2006





Auteur: Mohamed EL Manouar


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