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Observatoire de la presse

Le ralliement. Le Glaoui, mon père

Abdessadeq El Glaoui, Le ralliement. Le Glaoui, mon père. Récit et témoignage , Ed. Marsam, Rabat, 2004, 391p.

Qui ne connaît pas le Pacha Glaoui qui fût le seigneur des nombreux récits et auteurs de l'époque coloniale, et qui fut l'idéal type des tyrans et des traîtres dans les récits post-coloniaux ? Son fils Abdessadeq, l'auteur de ce livre, ancien Khalifa judiciaire de son père à Marrakech, réputé depuis l'époque comme proche des «nationalistes» a joué un rôle déterminant dans la conduite de son père vis-à-vis de la question du retour de Ben Youssef sur le trône. C'est l'essence de ce témoignage de première main qui a restitué dans le détail la période 1945 – 1955, période qui a connu de nombreux événements qui ont précipité l'indépendance du Maroc. Abssadeq fût mêlé de près (aux côtés de son frère Brahim, caïd de Telouat) aux histoires et à la vie de son père, qu'il en présente un portrait saisissant qui sort de l'ordinaire des tableaux idylliques et de racontars diffusés par voie livresque ou de presse.

L'auteur nous livre une vision de l'intérieur de la maison Glaoui, dont on apprend l'émergence dans le Haut Atlas Central à la suite d'un dahir du sultan Moulay Ismaïl. Il nous apprend aussi qu'à l'origine, les Glaoui ont le titre de Mezouar (Premier, Chef), qu'ils s'appellent Mezouari et que c'est ainsi que le Glaoui signait ses papiers et correspondances. Il n'est le Glaoui que pour les écrivains, les autorités et le reste. Il relate la généalogie de la famille qui dispose d'une chajara les remontant aux Omeyyades ( !?), ses ramifications et ses alliances au sein des tribus et du Maghzen. Des Sultans ont eu parmi leurs épouses des filles Mezouari, et les Mezouari se sont toujours mariés chez les dignitaires du Maghzen, à l'image de la propre mère de l'auteur, fille du Grand Vizir El Moqri, épouse de Caïd et ancien Grand Vizir Madani Mezouari, remariée au Pacha Thami devenu chef de «la maison des Glawa» après le décès de son frère. L'auteur s'attarde beaucoup sur la dimension «internationale» du Pacha, de part ses invités de prestige et de marque (les élites françaises, Churchill, les américains de la seconde guerre, Charlie Chaplin….) comme du côté de ses voyages à travers l'orient (Egypte, la Mecque , Jérusalem) et à travers l'Europe (France et Angleterre). Le Glaoui s'était taillé une réputation de grand seigneur, grand croyant, mélomane, généreux et attentionné, tellement attentionné que ses invités, selon les saison et les occasions, reçoivent le plus infime des gestes qui ont fait sa «science» et son versement dans les mœurs et les choses de son temps. Le Glaoui ne manquait pas de convoyer les dindes de noël à Winston Churchill en visite à Marrakech, ou d'organiser des grands prix dans son golfe qu'il mettait à disposition, ou encore l'organisation de battues de chasses pour le gotha, le tout ponctué de diffas où les mets, le service et la musique sont dignes des salons de Vienne de la fin du XIX° siècle. Le cœur du livre se trouve dans la période charnière où le Glaoui commençait à perdre du terrain face aux nouveaux acteurs de la scène politique marocaine. «Les nationalistes» ont pris sa place dans le Palais et deviennent les alliés du sultan, qui ne manqua pas de déclarer son désir d'émancipation de la tutelle du Protectorat. Pourtant, le Glaoui avait fait le voyage de Tanger avec le sultan, voyage considéré par les historiens comme fondateur d'une nouvelle ligne politique dans la vie marocaine. Abssadeq publie une photo inédite de son père aux côtés du prince Moulay El Hassan lors de cet événement. L'ultime passage réside dans «le ralliement», l'auteur nous rapporte presque au jour le jour, la chronique charnière d'août à novembre 1955, période des pourparlers d'Aix les Bains, le conseil du Trône, le retour de Ben Youcef en France et la déclaration rédigée et lue aux journalistes par Abdessadeq dans l'enceinte du Méchouar, où son père déclare que sans retour de Ben Youcef sur le Trône, point de solution pour le Maroc. Avant de s'éteindre, le dernier grand Mezouari avait participé à la gloire du Trône, comme l'ont fait ces ancêtres à maintes reprises. Les Glaoua ont sauvé Hassan Premier et son armée d'une tempête de neige, ils ont oeuvré pour la destitution de Abdelaziz et son remplacement par, un sultan du Jihad, son frère Abdelhafid. La sédition de 1953 s'inscrit dans cette logique au service du Trône, mais vu le changement et les mutations, on dirait que le Galoui n'avait plus les moyens d'imposer sa volonté. Sa puissance ne lui permis plus de se positionner en tant que force capable d'agir au travers du processus politique émergent. La puissance financière du Pacha a pris le pas sur sa puissance tribale qui avait fait sa force dans le temps. «Dis à ton mari que ce n'est plus l'époque d'Abdelaziz» disait le grand Vizir à sa fille, épouse du Pacha et mère de Abdessadeq. Dans cette phrase de son grand père, l'auteur résume l'histoire de sa famille. Le Glaoui s'est toujours incliné devant les sultans alaouites et c'est à leur services qu'il a consacré sa vie de guerrier, de caïd, de pacha, de conjuré et de rallié.

Témoignage de première main que celui de l'auteur, qui a enrichi son livre avec de nombreux documents en fac-similé, des photos précieuses du Pacha en compagnie des plus prestigieux personnages de son époque. Ce livre comble un vide dans l'histoire de la maison des Glaoua, il offre une matière riche d'informations et de données sur la gloire d'un père qui a façonné une partie du XX° siècle marocain, vu par le fils qui est resté fidèle à la mémoire, et a ainsi rappelé aux chercheurs, que loin des clichés, l'histoire du Protectorat français au Maroc reste à écrire.

Espérons d'autres témoignages sur l'exercice du pouvoir et de ses méthodes dans le «domaine» tribal du Caïd des tribus de la Région de Marrakech et de Warzazat, et du Pacha de la ville de Marrakech, un autre volet sur lequel la mémoire sociale pourrait apporter sa part, ce qui est une autre histoire.




Auteur: Mustapha El Qadéry


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