|
La prostitution coloniale. Algérie, Tunisie, Maroc (1830-1962) Christelle Taraud, La prostitution coloniale. Algérie, Tunisie, Maroc (1830-1962) , Payot , Paris, 2003, 495 p.
La recherche de Christelle Taraud nous ramène dans les bas fond de la société et de la décision politique des différentes autorités qui ont eu maille à gérer ce dossier de politique indigène, vital, délicat et juteux. C'est sous le signe de la réglementation que les autorités coloniales s'intéressèrent au dossier pour aboutir à l'hygiène publique, les quartiers réservés et les maisons closes, objets de la première partie. Deux autres parties de ce livre traitent de la marginalité et de la prostitution ainsi que des fantasmes et des réalités. L'aspect monographique et documentaire de la recherche offre aux chercheurs des différents spécialités, en sciences humaines ou sociales un fond de reconstituons sociologiques sur la société colonisée en Afrique du Nord. Les prostituées et la prostitution peuvent offrir une synthèse sur la clochardisation d'une partie de la société, qui a subi des impacts considérables des différents mutations qui ont bouleversé les différents segments territoriaux et sociaux qui composaient les indigènes de l'époque coloniale. Cela avait démarré sous les hospices de l'armée et les bordels du bled attachés aux bataillons de «la pacification». C'est là un volet de l'histoire qui nécessite une recherche spécialisée et à part entière. Aujourd'hui encore, les Atlas où persistent les casernes connaissent encore les bordels. Taraud pour sa part, nous amène plutôt vers les bordels urbains de Tunis ou d'Alger et surtout de Casablanca et son célèbre Bousbir. Elle relate également un épisode qui mérite d'être mentionné, le scandale de Marrakech (pp. 87-100) où elle relate l'histoire d'un projet émanant de «la politique officielle», qui consistait à la construction d'un quartier réservé aux prostituées en 1930. L'auteure s'est intéressée aux différents acteurs du dossiers sur la base d'un rapport d'une commission d'enquête, mandatée par le Résident, le général Noguès, et a reconstitué l'histoire du scandale à travers les différentes archives de la municipalité de Marrakech, ainsi que les divers correspondances administratives et personnelles relatives au dossier dans les archives de la Résidence. Le Pacha de Marrakech fut impliqué dans le projet, à titre administratif et personnel, aux côtés de hauts responsables à Rabat et à Paris dans la mise en exécution de la politique suivie, et dans l'édification d'une société immobilière créée pour ce projet de quartier réservé. Tous ont usé de leurs pouvoirs respectifs pour faire aboutir le projet porté par un entrepreneur privé avec des fonds publics d'où le scandale et l'enquête. Taraud nous livre également des informations de grand intérêt sur «les nationalistes» de Casablanca et le FLN d'Alger et leurs attitudes face à la prostitution et ses milieux. Par cette recherche, Taraud met à la disposition des éléments sérieux pour la lecture d'une partie de la politique coloniale française en milieu urbain, l'histoire de la projection orientaliste sur «Les Mauresques» ainsi que sur l'histoire des femmes en Afrique du Nord. Auteur: Mustapha El Qadéry
Les commentaires : Important :Prière de noter que les commentaires des lecteurs représentent les points de vue de leur auteurs et non pas d’AmazighWorld; et doivent respecter la déontologie, ne pas dépasser 6 à 10 lignes, critiquer les idées et non pas les personnes, êtres constructifs et non déstructifs et dans le vif du sujet.
|
||||||||||||||||||||||||
|